10 février 2007

Paneurope et souveraineté nationale, deux concepts antinomiques

Par Pierre Hillard, Docteur en Sciences politiques.

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Face à l’agression répétée des euromondialistes contre la souveraineté des Etats et en particulier celle de la France, il est utile de rappeler certains éléments permettant aux véritables défenseurs de la cause nationale de séparer le bon grain de l’ivraie. En effet, on peut remarquer une confusion chez certains conduisant à des rapprochements incompatibles avec une vraie défense de la cause nationale. Dans cette affaire, la Paneurope joue un rôle déterminant pour abuser les esprits.

Créée dans les années 1920 grâce à l’impulsion du comte Richard de Coudenhove Kalergi, la Paneurope est à l’origine de la création du Conseil de l’Europe, de l’hymne de l’Union européenne (l’Ode à la joie) et de multiples initiatives favorisant l’apparition d’un pôle européen unifié. Dès 1950, après avoir reçu la plus haute distinction européiste, le prix Charlemagne, R. de Coudenhove Kalergi rappelait la nécessité d’une « Europe unie de l’Islande à la Turquie comme de la Finlande au Portugal », de l’importance d’une « constitution fédérale » ainsi que de la création d’une « Union atlantique [qui] deviendrait une Fédération à trois avec l’Empire britannique comme pont entre l’Amérique et l’Europe » [1]. Ces déclarations furent relevées avec enthousiasme par Valéry Giscard d’Estaing quand il reçut à son tour le prix Charlemagne en 2003 [2].


La Paneurope est subdivisée en plusieurs branches (Paneurope France, Paneurope Allemagne, Paneurope Espagne, …) lui permettant de diffuser son idéal résumé par des « Principes fondamentaux » absolument contraires à la souveraineté des Etats puisque ils affirment que « […] L’Union paneuropéenne se déclare attachée au patriotisme européen couronnement des identités nationales de tous les Européens. A l’époque des interdépendances et défis mondiaux, seule une Europe forte et politiquement unie peut garantir l’avenir de ses peuples et entités ethniques. L’Union paneuropéenne reconnaît l’autodétermination des peuples et le droit des groupes ethniques au développement culturel, économique et politique […] » [3]. Comme on peut le relever, ces principes sont absolument contraires à ceux de la République française affirmant l’indivisibilité du territoire national et ne reconnaissant que le concept de citoyen sans aucune référence ethnique ou religieuse. Ces concepts paneuropéens expliquent logiquement que les anciens présidents de la Paneurope Allemagne, Alfons Goppel et Siegbert Alber [4], aient joué un rôle significatif dans l’élaboration de la charte des langues régionales ou minoritaires et la convention-cadre sur la protection des minorités [5]. Enfin, il faut rappeler que le président de la Paneurope Allemagne en 2007 s’appelle Bernd Posselt [6] et est député allemand au Parlement européen. Ce dernier fut aussi l’assistant d’Otto de Habsbourg, successeur de Richard de Coudenhove Kalergi en 1972 à la tête de la Paneurope.

Ce rappel des points forts de la Paneurope est nécessaire afin d’évoquer une fondation poursuivant l’idéal de son créateur : la Fondation Coudenhove-Kalergi [7]. Reprenant ces fameux « Principes fondamentaux », cœur de la pensée paneuropéenne, cette fondation est dirigée par Aloïs Mock ancien ministre des Affaires étrangères d’Autriche. Ce dernier joua aussi un rôle éminent dans les tentatives d’établir « un projet de protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme pour la protection des minorités » en liaison avec l’Union fédéraliste des Communautés ethniques européennes (UFCE, Föderalistische Union Europäischer Volksgruppen) [8], institut promouvant une Europe des régions à base ethnique et soutenu par le ministère de l’Intérieur allemand [Ibid., p. 149 et p. 183-186.]. La fondation Coudenhove Kalergi récompense ceux qui ont « contribué à la construction politique de l’Europe en tant que patrie […] » [9] en décernant un prix européen. Nous pouvons citer quelques heureux bénéficiaires comme Raymond Barre (1978), Helmut Kohl (1990), le président Ronald Reagan (1992), Otto de Habsbourg et Aloïs Mock (1994) ou encore l’ancien président décédé du Kosovo et âpre défenseur de l’indépendance de ce nouvel Etat, Ibrahim Rugova (2004) [10].

Nous pouvons relever une multitude de noms composant les membres du Conseil de la Fondation Coudenhove Kalergi en 2005 [11]. En raison de la philosophie du système, il est logique d’y retrouver des personnes comme Aloïs Mock, Otto de Habsbourg, Raymond Barre, Jakob de Coudenhove Kalergi, neveu du fondateur de la Paneurope, l’ancien président de la Paneurope France, Raymond Triboulet, … Mais l’habileté de cette fondation est d’avoir aussi attiré en son sein des personnes qui, théoriquement, ne devraient pas en faire partie. On peut ainsi s’étonner de trouver des noms comme ceux d’Alain Larcan, Président du conseil scientifique de la fondation Charles-de-Gaulle [12], Maurice Druon, secrétaire perpétuel de l’Académie française, Pierre Maillard, ancien ambassadeur du général de Gaulle ou encore Jean-Paul Bled, professeur à Paris IV Sorbonne, président du RIF (Rassemblement pour l’indépendance de la France) et directeur de la rédaction du journal L’indépendance. De deux choses l’une : soit ces personnes ont été abusées. Dans ce cas, elles se dépêcheront de démissionner afin de ne plus cautionner une fondation dont les principes sont mortels pour la France. Soit elles restent partie intégrante de la fondation Coudenhove-Kalergi. Alors, nous serons à quoi nous en tenir au sujet de leurs pseudo-activités en faveur de la défense des intérêts nationaux.

Pierre HILLARD

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